4. De l’eau pour le Sahara

Avec des preuves convaincantes qu’au passé il y a eu de l’eau dans le Sahara, le désir des chercheurs de connaître la raison des changements climatiques dans la région est tout naturel. L’essai de trouver des similitudes entre le climat du Sahara et celui de l’Inde est cependant non convaincant. En Inde se déroule un processus cyclique déterminé par les vents (le mousson) qui portent les nuages de l’Océan Indien vers le nord, où ils versent leurs précipitations sur les pentes des Montagnes Himalaya, les eaux résultées revenant ensuite par les grands fleuves de l’Inde dans l’océan. Le relief particulier de l’Afrique et la grande distance entre le Sahara et l’océan excluent tout élément de ressemblance entre le climat de ces deux régions. La cause des changements climatiques du Sahara doit être cherchée ailleurs!

Se procurer les quantités d’eau nécessaire pour l’agriculture par pompage de la nappe phréatique n’est pas une solution adéquate parce que son niveau descend d’autant plus, ou même pire, comme il est arrivé récemment en Algérie. En extrayant l’eau du premier niveau phréatique, ensuite du deuxième et puis du troisième, ces eaux ont été utilisées au-dessus du sol et sont devenues partiellement usées (à des engrais chimiques, par la pollution industrielle, les eaux ménagères etc.), mais elles n’ont pas été traitées et on les a déversées dans le désert, parfois à des débits d’environ 14.000 m3/jour. Ces eaux usées se sont infiltrées dans le premier lit aquifère mais n’ont pas pu passer plus en profondeur à cause des couches intermédiaires étanches en argile, et par conséquent elles ont élevé le niveau de cette première couche, en provocant des dégâts significatifs aux cultures de palmiers situées sur des sols défavorables et très humides.

La situation des pays riverains de la Mer Méditerranée, notamment l’Algérie, le Tunis et la Libye n’est pas plus favorable, car ils comptent aussi sur l’extraction de l’eau nécessaire des couches aquifères de profondeur. Sous cet aspect, la réserve d’eaux souterraines commune pour ces pays acquiert un rôle stratégique pour leur développement économique, de quelque sorte semblable à ce que les gisement de pétrole représentent en général, et pour exploiter cette eau il faut conclure de strictes conventions tri- latéraux entre ces états. Par les 8800 puits existants dans ces pays aux années 1980 on extrayait d’immenses quantités d’eau des couches phréatiques pour l’agriculture, pendant que la contribution en eau de pluie représentait à peine 0,0017% de la quantité d’eau consommée. Par conséquent, le niveau actuel des eaux phréatiques se trouve à environ 30 m de profondeur, mais il descend toujours.

Lorsque ce niveau arrivera à approximativement 400 m, le système de pompage ne sera plus économique et les cultures agricoles devront être arrosées avec de l’eau d’autres sources. A présent il y a diverses organisations internationales qui essayent d’imposer une utilisation équilibrée des réserves d’eau souterraines, mais si un manque sévère d’eau survenait dans des années successivement sèches, des conflits seraient possibles mais difficiles à maîtriser. De tout ceci il résulte clairement que la procuration de l’eau des couches aquifères souterraines dans les pays autour du Sahara n’est pas une solution de longue durée, une autre source d’eau devant être utilisée, mais laquelle?

En analysant la carte physique de l’Afrique du nord, on constate que le grand fleuve Niger, ramassant ses eaux des pentes nordiques des Montagnes Fouta Djallon, dirige son cours vers le centre du Sahara, mais un peu en aval de la localité Tombouctou il tourne à 90o vers le sud et de cette façon les eaux douces du Niger distribuées sans coût par la nature sont perdues sans une utilisation rationnelle, en se jetant dans l’Océan Atlantique. On constate aussi que l’anneau intérieur des montagnes du Sahara central, ayant au centre le Lac Tchad, présente une seule interruption vers l’ouest. La coïncidence de ces détails physiques contemporains ne peut pas être ignorée, en permettant d’expliquer le changement du cours du Niger par la parution, pendant les millénaires antérieures, d’évènements géologiques majeures dans la région.
Apres s’être détachée de la grande terre ferme précambrienne ayant en son centre le futur bloc africain et des nombreux territoires dont le déplacement dans le temps a mené à la configuration actuelle des continents, l’Afrique proprement dite a subi de nombreuses transformations, notamment des débordements de roches volcaniques et de nombreuses et profondes crevasses de son écorce (Fig. 17). Une de ces failles, produite sur la direction nord - sud, est située de manière perpendiculaire sur le cours initial du Niger, les eaux étant captées le long de cette fissure et changeant de direction vers le sud; des situations similaires se retrouvent aussi dans le cas d’autres cours d’eau comme le fleuve Zambézien, la cascade Niagara, le Nil etc. (Fig. 18) La carte de l’Afrique (voir Fig. 3) montre aussi le lit d’une rivière, à présent sec (oued), qui trace le trajet initial du Niger en faisant la liaison avec le centre du Sahara. En corrélant ces données à la datation des dessins rupestres, on peut reconstituer le cours du Niger il y a 10.000 - 8000 ans- il continuait son trajet de l’ouest à l’est, en portant ses eaux jusqu’au Lac Tchad- une relique de ce fleuve- en maintenant la nappe phréatique d’eau élevée dans la région et ainsi permettant l’existence de pâturages, de la faune et des communautés humaines.

Les chercheurs ont arrivé à la conclusion qu’autour des années 8000 av. C la végétation du Sahara était satisfaisante pour une faune locale, en assurant aux autochtones du gibier riche (la période du ‘boubal’, environ 7000 av. C) et des grains sauvages (période des ‘têtes rondes’, environ 6000 av. C). A cette époque se sont produits des mouvements forts de l’écorce de l’Afrique, en générant la faille qui a dévié le cours du fleuve Niger. La végétation du Sahara a commencé à ressentir le manque d’eau, et la savane initiale, une fois les herbivores domestiques apprivoisés (bêtes à cornes, chèvres, moutons), s’est changée dans d’étendus terrains pleins d’herbe favorables au pacage (période ‘bovine ou du pâturage’, environ 5000 av. C).
Pendant ces temps-là, environ en 3500 av. C, une ample migration de la population locale a eu lieu à cause des conditions difficiles de vie au Sahara, et le déplacement vers le sud étant bloqué par les forets équatoriales exubérantes, les seules possibilités ont resté soit l’établissement de ces gens vers le nord, sur les bords de la Mer Méditerranée, soit leur éparpillement le long du Nil. C’est la seule explication qu’on peut donner à la mosaïque des peuples de l’Egypte de diverses origines, habitudes et religions, qui finalement ont appris à vivre paisiblement ensemble justement dû à leur intérêt de gérer en commun les eaux du Nil pour l’agriculture et la navigation. C’est toujours à cette époque que les premières dynasties des pharaons d’Egypte sont apparues qui, en vue d’unifier les cultes religieux des habitants, ont aussi introduit le dieu à tête de bouc (symbole d’Amon), qui a été accepté dans le temps mais en gardant aussi les divinités locales spécifiques. Le cheval apporté en Egypte par les Hyksos et ensuit introduit aussi au Sahara (période du ‘cheval’, après 1250 av. C) a pu être utilisé jusqu’au début de notre ère lorsque, gênés par l’absence d’eau et de pâturages, les gens ont remplacé le cheval par le dromadaire (période du ‘chameau’, vers l’an 100 av. C), beaucoup plus adapté aux nouvelles conditions de la région.

Celle-ci est en réalité la cause de la désertification du Sahara, déterminée par l’apparition de la faille transversale sur le cours du Niger, et les mesures proposées dans cette étude conduisent justement à une ‘correction’ de la nature pour revenir à la configuration initiale.

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